Si nous voulons communiquer de manière assertive, il est important de distinguer les faits de deux autres éléments :
- leur impact sur nous (ressenti, émotions, …) ;
- et ce que nous en faisons (les pensées et les intentions d’action que cela génère).
Lorsque j’enseigne le DESC et ses déclinaisons en formation de communication et d’assertivité, je constate toutefois que nombreuses sont les personnes qui peinent à distinguer les faits de l’interprétation qu’ils en font.
Or, il est difficile, pour ne pas dire impossible, de s’exprimer assertivement sans cette capacité (voir article précédent).
Une armoire à 4 tiroirs pour mieux communiquer
Nous pourrions, à la suite d’Edel Maex, schématiser ainsi l’armoire mentale qui nous simplifiera la vie en nous permettant de ranger les différents ingrédients d’une situation de communication.
Imaginez deux axes :
- Un axe vertical sur lequel on retrouve en haut, votre point de vue et en bas le point de vue de votre interlocutrice/interlocuteur ;
- Un axe horizontal sur lequel on retrouve à gauche les faits et à droite ce que les interlocuteurs éprouvent (ressentis, émotions…) et ce qu’ils en font (interprétations, déductions – correctes ou erronées, les pensées qu’ils déclenchent, les intentions d’action qu’ils suscitent, …).
Que puis-je mettre dans le tiroir « ce que je sais des faits » ?
Ou « comment distinguer les faits des autres éléments ? » Il me semble que la métaphore de la caméra peut nous y aider et constituer une première ressource bien utile.
Ce que je sais des faits (et que je peux donc qualifier comme tel), c’est en fait ce qu’aurait vu (et ce que voit) une caméra qui serait située à ma place. Lorsqu’elle filme, la caméra n’a pas d’état d’âme, elle n’interprète pas le comportement et/ou la situation : elle les voit et ne les colore d’aucun affect. Nous pourrions donc utiliser la métaphore de la caméra comme un tamis qui nous permettra de distinguer ce qui relève des faits. Je ne pourrais donc ici traiter comme fait que ce qu’aurait vu une caméra située à ma place.
Un exemple ?
Je perçois chez mon interlocuteur un petit sourire et son ton me semble peu sincère : je suis convaincu qu’il se moque de moi.
Je peux alors dire : « Tu te moques de moi » (ou sa version moins soft « tu te fous de moi »). Je ne peux toutefois pas le prouver et je n’exclus pas que nous partions alors dans un chassé-croisé de « mais non pas du tout ». « Si, je l’vois bien » … sans que jamais nous n’entrions dans le registre factuel.
Si, comme je viens de le faire, j’affirme comme factuel quelque chose qui ne l’est pas (que je ne peux en tout cas prouver), le risque d’erreur est élevé … et la communication va généralement prendre un tour peu constructif. En prêtant de manière affirmative une intention à l’autre, et qui plus est ici, une intention négative, je l’accuse… Il va donc se défendre.
Mais que faire alors si j’ai l’impression que l’autre se moque de moi ?
Tout simplement dire : « j’ai l’impression que tu te moques de moi ».
J’exprime alors l’interprétation que je fais de son comportement… comme une interprétation : ton sourire, le ton que tu emploies, … contribuent à ce que j’ai le sentiment que tu te moques de moi.
Cela pourrait donner un scénario comme celui-ci :
- « J’ai l’impression que tu te moques de moi ».
- « Mais non, pas du tout ».
- « Je t’assure que j’ai perçu un sourire et un ton qui m’amènent à le penser ».
- « Je te jure que non ».
- « OK, j’entends bien. Je te faisais juste part de l’impression que suscitait ton comportement ».
Mais, me direz-vous, tout n’est pas résolu parce que j’ai remplacé le « tu te moques de moi » par un « j’ai l’impression que tu te moques de moi ».
Vous avez raison. Ce faisant, j’ai toutefois placé l’information dans le bon tiroir (en haut à droite). Et puisque je ne l’affirme plus comme un fait, mon interlocuteur peut quant à lui m’indiquer sa version des faits qui viendra confirmer ou infirmer la mienne. Sera-t-il de bonne foi ? Je l’ignore. Je ne l’ai toutefois accusé de rien et j’ai fait part de mon ressenti : je me suis respecté et je l’ai respecté. Les conditions sont maintenues pour un dialogue assertif potentiellement constructif.
Ce modèle induit évidemment d’autres développements : entendez que d’autres articles suivront.
Si je possède ma caméra, mon interlocuteur en a une lui aussi et elle dispose d’un autre point de vue.
Paradoxalement, j’expliquerai également qu’il me sera plus facile de disqualifier les faits exprimés par mon interlocuteur que son ressenti.
Enfin, il me semble également intéressant d’aborder les situations de communication dans lesquelles il me semble impossible d’à la fois me respecter et de respecter mon interlocuteur. Que faire alors ?
Vous avez d’autres questions ? D’autres propositions ? D’autres réactions ? N’hésitez pas à alimenter la réflexion !
Commentaires
One Comment
Hicham
Tres intéressant article je lis attentivement afin d’extraire le bonnes idées et les mettre en pratique dans mon quotidien