Et si oui, quand ?
En matière d’ assertivité, la question se pose quelquefois et la réponse traditionnelle nous semble évidente : la personne assertive ne doit pas se justifier. Surviennent alors généralement le distinguo entre « justifier » et « expliquer » et les sempiternels : « je ne me justifie pas, je m’explique ».
Sans en remettre nullement l’intérêt en cause, j’avoue ne pas avoir envie de me perdre dans des débats sémantiques entre justifier et expliquer.
Je partirais d’un intéressant apport de Juliette Tournand pour, sans tout résoudre, au-moins indiquer ce qui me semble être une bonne raison d’envisager d’aller au-delà de la simple affirmation de soi pour ne pas mettre notre interlocuteur en situation ambiguë.
Mais remontons le courant …
Qu’est-ce que l’assertivité ?
Beaudry et Boisvert (je vous recommande leur ouvrage) définissent ainsi la communication assertive :
« Communiquer de façon assertive, c’est exprimer ses pensées, ses sentiments et ses façons de voir par des mots ou des gestes et d’une façon calme, honnête et appropriée tout en voulant connaître les sentiments, les pensées et les façons de voir de l’autre.
Cela implique tant le respect de soi que le respect de l’autre.
Communiquer de façon affirmative, c’est dire à l’autre « voici ce que je pense, voici ce que je ressens. Voici comment je vois la situation. Et je suis prêt à écouter et à essayer de comprendre ce que tu penses, ce que tu ressens et comment tu vois la situation ».
On distingue généralement l’assertivité de 3 autres attitudes en les situant sur un modèle à deux axes.
Comme tout modèle, il s’agit d’une simplification de la réalité qui en réduit la complexité.
Si cela vous intéresse, j’en expliciterai peut-être l’un ou l’autre aspect qui me semble important dans un autre post.
Je vais me contenter ici de souligner ici la zone intitulée « ambiguïté et confusion ». J’emprunte le terme de confusion à l’excellente « Stratégie de la bienveillance » de Juliette Tournand.
Cette zone prend la place de la manipulation qu’on retrouve souvent dans ce modèle et qui me semble présenter deux défauts majeurs :
- Qualifier de manipulation une attitude où aucun des deux ne se respecterait, où aucun des deux ne dirait ce qu’il pense et ressent me pose question ;
- Considérer que si la situation n’est pas claire, c’est qu’il y a manipulation (et donc intention de la part de l’autre), enclenche de facto une réaction colorée négativement et peu propice à une sortie de la situation par le haut.
- Le fait de qualifier à priori de « confusion » ce qui se trouve dans cette zone appelle au contraire à lever ladite confusion en demandant et en offrant de la clarté.
La démarche qui consiste à clarifier me semble plus propice à l’assertivité que celle qui consiste à déjouer une manipulation que, bien souvent, je ne peux démontrer (entendez que je n’exclus pas qu’il puisse s’agir de manipulation… mais que la considérer ainsi n’apporte aucune valeur ajoutée et conduit à des réactions crispées).
Quel rapport avec la question initiale : «l’assertif doit-il se justifier ? »
La simple redéfinition de cette zone me semble offrir une piste de réponse à notre question de départ. L’assertif doit-il se justifier (ou s’expliquer) ? Il me semble qu’il doit en tout cas l’envisager quand ne pas le faire conduirait son interlocuteur (et la situation) dans une zone de confusion… et l’éloignerait dès lors de l’ assertivité.
L’envisager ou le faire ?
J’ai bien dit l’envisager : être assertif ne contraint à rien d’autre qu’à se respecter et à respecter l’autre. Et quelquefois je vais me trouver dans une zone où me respecter (et ne pas dire) pourrait amener l’autre à avoir la perception de ne pas être respecté.
Je peux évidemment alors dire les choses pour clarifier et nous empêcher de verser dans la confusion. Je peux aussi me respecter (ne pas dire parce que je ne le souhaite/peux pas) et métacommuniquer : « je sais que je nous mets dans une situation inconfortable et confuse. Ce n’est pas mon objectif. Je te demande de me faire confiance et de considérer que j’ai de bonnes raisons de ne pas dire ».
En synthèse
L’assertif doit-il se justifier ? Il ne doit rien. S’il veut être cohérent avec la définition de l’assertivité, il sera toutefois soucieux de respecter son interlocuteur et de rendre la situation aussi lisible que possible. A défaut d’être transparent sur le contenu, il pourra veiller à soigner la relation en métacommuniquant.
Article publié d’abord sur LinkedIn.
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