
Cet article constitue la seconde partie d’un texte qui en comporte(ra) trois. La première se trouve ici et parle de conscience et d’acceptation de soi, de confiance en soi et de responsabilité.
Cette seconde partie reprendra ces quatre concepts en les appliquant cette fois à l’autre. Elle n’a d’autre prétention que de partager une réflexion, du genre qui vous prend avant de vous endormir et que vous devez coucher sur papier sous peine de passer une nuit blanche… N’hésitez dès lors pas à l’enrichir, à la critiquer, à la questionner sur la forme et sur le fond: c’est sa raison d’être.
La conscience de l’autre, des autres et de l’altérité, comme une ouverture
Que serait ma conscience de moi sans conscience de l’autre ? Se (re)connaître induit de (re)connaître l’autre et avec lui l’altérité, la différence. Je n’existe dans mon unicité, ou plutôt elle ne présente d’intérêt que parce qu’il y a autrui… que parce qu’il y a différence, que parce que ses/ces différences me rendent unique et sont promesses de possibles pluriels. Je peux donc observer autrui avec (au-moins) la même bienveillance (et presque la même exigence) que je m’observe moi, m’ouvrir à cette, à ces différences, m’en enrichir, m’en nourrir tandis qu’il peut faire de même des miennes.
Soyez curieux d’autrui comme vous l’êtes de vous : l’humain est un être social et si nous sommes ce que nous pensons, ce que nous faisons et ce que nous éprouvons, peut-être sommes-nous aussi et surtout nos rencontres.
A travers mes rencontres, je peux (mieux) percevoir ce qui nous distingue et qui me dit des choses tant de l’autre que de moi. Même si ce n’est pas son but premier, ma prise de conscience de l’autre questionne et accroît ma conscience de moi.
Au même titre que ma conscience de moi, ma conscience de l’autre est toutefois relative et il ne me faut pas l’enfermer dans / le réduire à la perception que j’en ai. Il n’est par ailleurs pas plus figé que je le suis et je dois lui reconnaître le droit de changer, d’évoluer comme je me le reconnais.
La conscience de l’autre induit que je développe mes capacités d’écoute, de réelle écoute active ainsi qu’un juste niveau d’empathie, ce que j’appelle parfois l’empathie responsable (responsable au sens Lévinien du terme).
L’acceptation de l’altérité et de la différence
Quel est l’intérêt de l’autre s’il est moi ? Il me faut donc accepter son altérité, sa différence comme un présent. Cette acceptation n’équivaut toutefois pas à une validation : j’accepte celui/celle que tu es ce qui ne signifie pas que je partage ta conception du monde (le fait que je la partage ou non importe d’ailleurs peu). Parce que je l’accepte, je peux écouter ta différence en vue de te comprendre et non de te convaincre. Accepter ta différence m’en apprend plus sur nous que le fait de la refuser ou de la nier. Tes différences accroissent aussi notre complémentarité et nos possibles.
L’exercice est évidemment particulièrement difficile quand ces différences portent sur des valeurs, des choses que tant toi que moi considérons comme fondamentales : on est alors bien loin du « yaka ».
Au sein des organisations, se pose aussi parfois (et elle mérite d’être posée !!) la question des différences qui ne s(er)ont pas acceptées. Et le fait qu’elles se posent fait avancer les organisations sur la définition d’un « commun dénominateur », de ce qu’un de mes collègues appelait l’articulation du « je-nous » : ce socle qui nous permet d’exister en tant qu’équipe/organisation tout en nous permettant d’être en tant qu’individus. Il me semble intéressant de ponctuellement (s’)interroger (sur) ce cadre : dans quelle mesure les restrictions qui y figurent sont-elles cohérentes avec /servent-elles les valeurs énoncées, la mission qui rassemble le collectif, l’environnement dans lequel il s’inscrit ?
La confiance en l’autre, comme un pari
Une fois défini ce qui fait le « nous » (un cadre clair, souple, flexible et pas trop restrictif), deux options s’offrent à nous : l’a priori de méfiance me semble être la plus répandue alors que je suis partisan de lui substituer l’a priori de confiance. La confiance comme un pari une fois que / parce qu’un cadre clair est défini… La confiance comme un pari sur l’intelligence de l’autre, sur sa volonté de s’inscrire dans le projet collectif parce que celui-ci est attrayant et a du sens (aussi) pour lui, parce qu’on le lui a expliqué, voire, parce qu’il a contribué à sa définition. La confiance parce qu’elle est potentiellement porteuse d’effet Pygmalion quand la méfiance fait courir le risque d’un effet Golem. La confiance parce que la méfiance est coûteuse en temps, en argent, en énergie, parce qu’elle entrave la créativité, génère des ressentis négatifs.
Une confiance qui ne doit en aucun cas être aveugle évidemment.
La responsabilité jusqu’à et au-delà de ce qu’en dit Levinas
J’ai évoqué (très brièvement) plus haut Levinas et sa conception de la responsabilité. J’engage le manager/coordinateur/chef/leader… parfois appelé « responsable » à l’être… à l’être au sens lévinien du terme évidemment : je suis responsable de toi induit alors une attention bienveillante à l’autre, une attention offerte, non imposée. Se pose alors la question de savoir si ladite attention bienveillante doit être unilatérale : la réponse me semble évidemment être négative. On parle bien d’adultes rémunérés et « engagés » (dans tous les sens du terme) dans une organisation : il est légitime d’espérer que tous soient responsables au sens lévinien du terme.
J’invite également chacun (et pas uniquement ceux qui sont porteurs d’un « titre » de responsable) à l’être au-delà de ça en instaurant une culture du feedback (mutuel) qui offre à chacun l’opportunité d’élargir sa conscience de lui, qui permet à chacun de connaître l’impact de son comportement sur autrui, sur les résultats, sur le collectif… La responsabilité dont il s’agit ici relève dès lors plutôt d’une (toujours) bienveillante exigence…
Je suis responsable de toi : je réponds de toi et je te réponds…
Je suis attentif à toi, à tes difficultés, à tes besoins sans attenter à ton autonomie ET je suis exigeant, j’attends de toi que tu « mouilles ton maillot » pour le projet collectif. Je ne suis pas indifférent à ton implication, à ta performance, je t’indique ce que j’en pense (en bien comme en moins bien) et t’invite à faire de même pour moi. Ce faisant je te « reconnais » et tu me « reconnais ».
à suivre…
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Nous sommes des survivants d’une « époque formidable »… | Pileface.fr
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